L'héritage de l'Archange
Officier d'élite, guerrier remarquable, chef aimé de ses hommes, jusqu'à être surnommé “l'Archange” par ceux-ci… Les décorations, les citations et les faits d'armes de notre Parrain pourraient suffire à dresser le portrait élogieux qu’il mérite. Mais le Capitaine Goupil nous lègue également un état d’esprit particulier, fait d'aventures et de réflexions poussées sur les enjeux complexes des territoires sur lesquels il a servi.
Bien qu’officiellement souveraine sur le territoire indochinois, la France avait dû accepter en 1940, suite à des pressions militaires, un droit de passage et de stationnement de l’armée japonaise. Dans une lettre écrite à sa mère le 10 octobre 1941, Goupil parle d’un pays agréable où il fait bon vivre. Décrivant les paysages, l’architecture des villages mais aussi les coutumes locales et les difficultés rencontrées avec les Annamites ou les Japonais, il dresse un tableau de fin observateur d’un territoire complexe.
A sa mère, il écrit : “Ma vie y est toujours très agréable, très active – Je suis toujours en mouvement sur les pistes et les sentiers de la région ce qui est sympathique car les panoramas sont splendides. [...] Les villages tonkinois ont une physionomie curieuse : les maisons basses en torchis à armature de bambous, recouvertes de paille de riz, meublées très sommairement, l’élément essentiel étant l’autel des ancêtres devant lequel brûlent les baguettes d’encens, sont serrées les unes contre les autres.”
“Mes tirailleurs ne se permettraient pas de m’adresser la parole autrement qu’en m’appelant « quân a modt », c’est-à-dire le « vénérable chef à un galon » - De mon côté, même échange de politesse, je leur dis « quyên bac » : soit tirailleur de 2ème classe, frère de ma mère. Ils apprennent très difficilement le français ; aussi me suis-je mis à l’annamite, je commence à le parler, le plus dur étant la prononciation – La langue étant monosyllabique, les accents ont une importance primordiale.”
“Je n’ai pas encore pu aller en Chine : c’est d’ailleurs assez peu recommandé actuellement, les Chinois étant particulièrement nerveux depuis l’arrivée des renforts japonais en Indochine – Les Japonais occupent surtout la Cochinchine – Cambodge – Les relations sont plutôt froides : Français et Japonais ne se saluent pas – Nous vivons ici assez en dehors des évènements internationaux”
Ses journées sont rythmées par la chasse aux pirates chinois. Ces derniers sont décrits comme lâches par Goupil, cherchant un butin facile et n’hésitant pas à attaquer en bande des villages du Tonkin. Ils fuient la plupart du temps face à l’armée française, supérieure militairement. Goupil décrit aussi la vie économique du territoire, s’attardant longuement sur les infrastructures existantes ou l'achalandage des marchés des villages qu'il traverse. Jusqu’en 1945, il apprend à connaître la culture asiatique et à commander des annamites.
En effet, en 1945, les autorités françaises en Indochine, restées jusqu’alors assez éloignées des troubles politiques en métropole entre Vichy et la France Libre, passent progressivement sous la responsabilité du GPRF et marquent une position à la fois plus proche des Etats-Unis et plus ferme à l’encontre du Japon. Le 9 mars 1945, les forces japonaises décident de renverser l’administration coloniale et s’ensuivent d’âpres combats. Le lieutenant Goupil prend alors des notes quasi quotidiennement. La première page de son carnet étant arrachée, nous ne pouvons découvrir son état d’esprit et ses réflexions qu’à partir du 11 mars 1945, et ce, jusqu’au 11 mars 1946. Un an d’écrits qui nous aident à mieux comprendre l’esprit de notre Parrain et de le prendre en exemple.
Sa blessure du 2 avril 1945 est une expérience assez douloureuse moralement: il ne rêve que de retrouver sa capacité à combattre et les longues semaines de convalescence sont pour lui interminables. Il apprend l’anglais en autodidacte seulement grâce aux revues de l’hôpital puis au fil de rencontres de fortune. Entre deux sorties clandestines des hôpitaux militaires, il côtoie des Américains, des Canadiens, des Britanniques et des Hindous. Lui, jeune saint-cyrien s’étant engagé pour servir la France tout au long de sa vie, voit la différence avec les soldats américains pour qui une blessure est synonyme de retour heureux au pays. “Les Américains donnent bien l’impression de faire la guerre sérieusement, mais sans enthousiasme ; ils ne cachent pas leur désir de rentrer chez eux et quand j’exprime l’espoir de pouvoir bientôt « remettre ça » contre les Japonais, ils rient joyeusement en me trouvant vraisemblablement original, car leurs blessés sont automatiquement renvoyés « at home » et ne s’en plaignent pas.”
C’est que Goupil fait partie de ces poètes de la gratuité absolue, qui trouve sa joie dans les épreuves que l’Indochine lui offre. Il est de ces chefs généreux dont l’âme rayonne dans le cœur de ses subordonnés. Que ferait-il de plus dans une France maintenant libérée ?
Cette volonté guerrière, il l’affiche aussi dans sa volonté de poursuivre le combat face à un ennemi supérieur en nombre et en matériel. Comme le Viêt Minh le fera quelques mois plus tard contre l’armée française, Goupil est favorable à l’action de guérilla face aux Japonais. Il n’hésite pas à critiquer dans ses notes les décisions trop timorées à son goût du commandant Reul, son commandant de bataillon, qui ne veut pas disperser ses hommes et matériels pour rester dans un mode d’action plus conventionnel, quitte à fuir le contact. Le 25 mars 1945, un peu plus de deux semaines après les premiers combats face aux Japonais, il écrit : “Il devient de plus en plus difficile de trouver des coolies pour transporter nos caisses de munitions – Nous sommes obligés d’en cacher dans des grottes, rapidement choisies – Faute de pouvoir les transporter, il nous faut aussi cacher des pièces de mitrailleuses : la méfiance grandit chez les cadres à l’égard du Cdt Reul qui n’a pas l’air de concevoir le seul genre de lutte que nous puissions efficacement mener : la guérilla, par petits groupes, dispersés, rapides et légèrement armés – Il est trop tard déjà pour disperser notre matériel : il est bien évident que nous ne retrouverons jamais celui que nous dissimulons maintenant. Au réveil, premiers déserteurs, partis avec les frontaliers – 4 dans ma section, des jeunes”
Son affectation au 2e commando léger du 5e RIC lui donnera l’opportunité de trouver cette liberté d’action. Même s’il ne s’agira pas de guérilla proprement dite, cette unité lui permettra de pourchasser les combattants communistes, très mobiles, et d’afficher des victoires importantes dans cette guerre qui ne fait que commencer. Il s’efforce néanmoins de donner du sens à son action tout en étant intimement convaincu du bien-fondé de l’engagement de la France en Indochine. La présence française est pour lui le seul moyen de préserver la stabilité d’un pays aux ethnies multiples et qui verrait les ingérences étrangères proliférer dès le départ des Français. Il souligne les efforts de développement consentis par Paris et le financement d'infrastructures de toutes sortes. Il décrit, le 5 janvier 1946, beaucoup d’énervement au sein de ses hommes, en particulier ses soldats annamites : “Mes hommes sont furieux : Thorez, paraît-il, aurait demandé la suppression automatique de la nationalité française pour tous les militaires du corps expéditionnaire d’Extrême Orient – Le manque d’information est flagrant : on confond, dans la presse française, Indochinois et Annamites et bien des Français de bonne foi se demandent sincèrement si notre action actuelle est justifiée du point de vue moral – A mon sens aucun doute à ce sujet n’est permis :
1°/ - L’Indochine est une fédération de peuples très différents les uns des autres ; notre départ réveillerait les rivalités latentes entre Annamites – Cambodgiens – Laotiens – montagnards tonkinois – Moïs…
2°/ - Le gouvernement du Viêt Minh a été mis en place par les Japonais ; le premier acte de ce gouvernement a été de déclarer « le Français ennemi numéro un ».
3°/ - Les populations annamites ne sont pas suffisamment évoluées pour pouvoir adopter un gouvernement démocratique actuellement, sans risquer d’être exploitées [...] - Le départ de la France entraînerait l’intervention de puissances étrangères : Chine, au moins au nord – États- Unis... Or nous n’avons pas à rougir de notre œuvre coloniale en Extrême Orient quand on a vu l’état d’anarchie qui règne en Chine, pays libre.
4°/ - Malgré les apparences actuelles et les erreurs de notre propagande qui clame à loisir que « l’ère de l’exploitation » est terminée (comme si les Français envoyés de France en 1935 par exemple avaient des âmes d’exploiteurs et de garde chiourme !), le Français n’est pas haï de la masse indochinoise.
5°/ - Les intérêts français sont considérables : plantations d’hévéas, instituts Pasteur, hôpitaux, mines, vois ferrées… (sic) Nous n’avons pas le droit d’abandonner l’héritage de nos prédécesseurs, dont tant déjà sont morts sur cette terre indochinoise -”
Sa position est d’autant plus compréhensible qu’à la date de ces écrits, cela fait déjà cinq années qu’il parcourt l’Indochine dans tous ses recoins et qu’il voyage à travers les autres pays de la région. Il est frappé par les grandes différences culturelles avec les Chinois mais aussi et surtout par le colonialisme à l’anglaise qu’il découvre en Birmanie lors de sa convalescence. Les deux empires coloniaux n'administrent pas leurs colonies de la même manière et n’entretiennent pas les mêmes relations avec les peuples indigènes. Si les Français ont tendance à plus contrôler l'administration que les Anglais, ils vont cependant beaucoup plus s’intégrer à la population locale et chercher le vivre-ensemble. Goupil est frappé par la misère en Birmanie et l’attitude de caste des britanniques.
“Le contraste entre l’aisance d’un certain nombre de commerçants hindous : marchands de tissus, bijoutiers fort nombreux... L’extrême misère de la moyenne de la population est frappante - L’attitude des anglais vis à vis des hindous – Très différend de la notre à l’égard des Indochinois – La ville anglaise, aérée, confortable, comportant de charmants cottages au milieu de jardins bien entretenus, bâtie le long du Brahmapoutre, est nettement distincte de la ville indigène – On sent que les rapports entre anglais et Hindous sont réduits au strict minimum ; les premiers ignorent et je crois bien, méprisent les seconds – C’est peut être pour cela que les officiers hindous recherchent volontiers notre compagnie : nous sommes moins distants (et nous ne sommes pas occupants). Le cercle militaire s’intitule anglo-indian, mais on n’y voit à peu près jamais un homme de couleur – Les officiers hindous, quand ils se débrident, n’hésitent pas à exprimer des sentiments anti-anglais forts violents - Mais la tolérance anglaise à l’égard des indigènes est très grande : beaucoup plus grande que la notre à l’égard des Indochinois – La province d’Assam est administrée, à titre anglais, par 2 ou 3 fonctionnaires seulement, tous les autres fonctionnaires sont hindous. Les journaux hindous impriment des articles d’une violence extraordinaire contre les anglais (comme l’amiral Decoux n’en aurait jamais toléré à son égard, dans la presse annamite).”
On retrouve de nombreuses analyses de ce type dans ses écrits et le jeune lieutenant Goupil s’attache à comprendre toutes les subtilités de la région. Il sait que cette connaissance est absolument nécessaire pour pacifier l’Indochine, de façon à ne pas attiser le sentiment anti-français des populations locales. Il est déçu du manque de connaissances des fonctionnaires issus de la métropole du territoire qu’ils administrent. Malgré toute leur bonne volonté, cela est préjudiciable au maintien de la présence française en Extrême-Orient. Si la bataille est militaire, elle est aussi politique et Goupil dénonce le manque de communication entre les administrations civiles et militaires qui laisse trop souvent les civils annamites à la merci des représailles du Viet Minh. “Les membres des cabinets tant civils que militaires sont bien peu au courant des questions indochinoises ; j’ai eu l’occasion, depuis 1 mois, d’en fréquenter un certain nombre et il est assez inquiétant, pour l’avenir de la Fédération Indochinoise, de se dire que des questions primordiales seront traitées par des fonctionnaires, de bonne volonté certes, mais combien incompétents !”
Véritable saint-cyrien fidèle à ses valeurs et à ses principes moraux, Goupil s’oppose à la pratique de la torture, qu’il mentionne à demi-mot dans ses carnets. Conscient que la contre-insurrection que le corps expéditionnaire mène nécessite de gagner les cœurs et les esprits, il pense qu’au-delà même de l’éthique, ces pratiques ne servent pas la cause que la France défend. Au contraire, elle ne fait que rendre inutile la propagande française qui se voit comme la patrie des Droits de l’Homme. Il écrit le 2 février 1946 : “Noter que les procédés employés par le personnel de la sûreté (qui comprend beaucoup de métis franco annamites) pour obtenir des renseignements de la part des prisonniers, ne sont pas toujours à notre honneur ; leur emploi est parfaitement impolitique et la raison donnée, que les Viet Minh traitent encore plus mal leurs prisonniers, n’est pas valable, puisque nous justifions notre action au nom des principes de liberté et de civilisation – D’ailleurs nos hommes, venus pour la plupart des maquis où la pitié n’était pas particulièrement de mise, sont volontiers cruels et comprennent mal, ayant vu tomber leurs camarades indistinctement sous les coups des uns et des autres, que l’on traite différemment allemands et annamites”
Ces neuf années passées en Indochine forgent notre Parrain. Il s’est transformé en officier aguerri, capable de commander des hommes de cultures différentes et de saisir toutes les nuances d’un territoire auquel il s’est attaché. A son retour en France en 1950, à l’âge de 29 ans, il est déjà chevalier de la Légion d’Honneur et décoré de la Croix de Guerre des T.O.E. 1939-1945 en Indochine et de la Croix de Guerre des T.O.E. en Indochine (guerre 1946-1954). Néanmoins, lui qui est resté plusieurs années sans nouvelle de sa famille en métropole a gardé intacte son esprit de jeunesse. La flamme saint-cyrienne qu’il porte en lui le pousse à se porter volontaire pour le bataillon français qui part en Corée. Une fois encore, il œuvre avec fidélité pour le succès des armes de la France en Extrême-Orient.
Pour satisfaire au format américain, le bataillon français, qui appartient au 23ème Régiment d’Infanterie US, doit comporter une compagnie composée de soldats coréens. Tout naturellement, le capitaine Goupil est désigné pour commander cette compagnie baptisée ROK (Republic Of Korea). Notre Parrain a débarqué en Corée début janvier puis a entraîné sa compagnie quelques semaines avant de connaître ses premiers combats dès le début du mois de février 1951. En effet, le 1er février s’engage la bataille des Twin-Tunnels où, après une avancée des troupes chinoises, les Français reçoivent l’ordre de tenir. L’exemplarité du Capitaine Goupil permet de transmettre aux soldats français et coréen son courage et sa témérité : le bataillon tient. Mieux, une contre-attaque permet de reprendre le terrain perdu. Le 3 février 1951, le jeune officier écrit :
“Mes chers parents,
Je vous adresse cette courte carte pour vous dire toute mon affection et vous confirmer que je suis toujours en excellente santé. La semaine qui vient de s’écouler a été assez dure, patrouilles et opérations de jours, dans un terrain souvent difficile ; veille sur les positions, sans couchage, de nuit. Les hommes se sont magnifiquement battus, le 1er février, en repoussant au cours de 12 heures de combats acharnés, côte à côte avec un bataillon américain, les assauts de deux régiments chinois. Mes soldats coréens se sont bien conduits et j’ai eu le plaisir de les mener à une contre-attaque qui, à elle seule, aurait valu le voyage en Corée. L’aviation, intervenant en fin de journée, a consommé la déroute chinoise. Le moral est excellent. Affectueusement
— Robert –”
Les combats se succèdent et le bataillon français, hué à son départ de France, offre à notre Parrain des situations similaires à ce qu’avaient pu vivre ses grands Anciens. Le général Monclar, redevenu lieutenant-colonel pour commander le bataillon, déclara le 15 septembre à propos de la bataille de Crève-Coeur : “Vous pourrez dire à vos anciens que vous avez vécu quelque chose qui ressemble à Verdun !” Saint-Cyrien de la promotion de Montmirail (promotion sortie de Saint-Cyr en 1914, dont 233 officiers sont morts pour la France entre 1914 et 1955), le général Monclar avait été blessé 7 fois, cité à 11 reprises et fait chevalier de la Légion d’Honneur au cours de la Grande Guerre. Cet homme savait de quoi il parlait.
Cependant, cette bataille de Crève-Coeur sera la dernière pour le Capitaine Goupil. Alors qu’il fut proposé à titre exceptionnel pour le grade de chef de bataillon quelques heures auparavant, Madame la Gloire décida de rappeler auprès d’elle ce saint-cyrien remarquable à l’Idéal intact. Tué par un obus le 26 septembre 1951 en se montrant indifférent au danger, l’Archange meurt dans un ultime moment de bravoure, sortant de sa tranchée pour pouvoir coordonner l’assaut avec l’autre compagnie française. Ce nom d’Archange, donné par ses hommes, dépeint un chef ferme mais profondément bienveillant dont l’enthousiasme rayonnait dans le cœur de ses subordonnés. Ce mot du colonel Le Mire exprime peut-être tout ce qu’il faudrait retenir de lui : “Trente ans, des yeux vifs, un nez droit, une mâchoire nerveuse, un corps résistant, une âme de fer et beaucoup d’idéal. Goupil est un de ces officiers exceptionnels que ses hommes appellent sans plaisanter “l’Archange”. Il est à la fois bon et ferme, très strict pour lui-même et sait être indulgent pour les autres ; et sur les pitons coréens, entre deux bombardements d’artillerie, il se rafraîchit l’esprit en lisant Dostoïevski.”
Naturellement, plusieurs lieux portent le nom de cet officier français, que ce soit des bâtiments, des ouvrages ou bien des lieux de recueillement. Dès décembre 1951, un pont construit par les Américains en Corée porte son nom. Inauguré en présence d’autorités militaires françaises, ces dernières diront apprécier le geste de nos alliés.
La caserne Goupil, à Saint-Germain-en-Laye, abrite aujourd’hui le régiment de cavalerie de la Garde Républicaine.
Enfin, plusieurs lieux sont dédiés à la mémoire du Capitaine Goupil et se prêtent parfaitement à un moment de recueillement. Notre Parrain est enterré à Scy-Chazelles ; vous pourrez voir sa tombe dans le cimetière municipal de la commune dont son père a été le maire de 1947 à 1953. Une stèle à son honneur fut érigée à l’endroit même de sa mort, à Crève-Cœur à Yanggu en Corée. Enfin, plus proche géographiquement, le monument du bataillon français de l’ONU se trouve dans le IVe arrondissement de Paris sur la place éponyme.